Le Patriote des Côtes du Nord ( journal du Front National)imprimé clandestinement à Morlaix !
Evoquant
ce que furent les heures de l’Occupation,
François
( Jean Devienne
) dans le premier numéro
du Patriote des Côtes du Nord paru après la Libération indique que le
journal fut imprimé par Louis Boclé
, Imprimeur à Morlaix. Celui- ci
apporte son témoignage en Octobre 1944 dans Le Télégramme
de Brest et de l’Ouest . Ancien combattant de la guerre 14-18 , Louis Boclé
imprime quelques tracts clandestins durant l’Occupation
quand un ami de son fils le contacte et teste son appui à la résistance. Par
la suite un agent vient lui annoncer la venue prochaine de François , chef du
Front National
des Côtes du Nord. Combien prendrez-vous pour imprimer un
journal ? lui demande -t-on .
les risques sont tellement grands, répond Boclé, qu’aucun paiement
ne les couvrirait. Je ne veux pas
toucher un sou dans cette affaire ;mais
gratuitement je suis tout disposé à marcher ! répond -t-il à son
interlocuteur.« Enfin, François ( Jean Devienne) arriva en personne à Morlaix. Je ne le connaissais que sous ce prénom ;
le chapeau rabattu sur les yeux, il traversa rapidement l’atelier, en
tournant un peu la tête de côté, pour que les personnes présentes ne
distinguent pas son visage, car il était traqué par la Gestapo. Quelques
fois la copie m’était apportée par de jeunes femmes, surtout Christiane
, rédactrice au journal et qui s’occupait aussi de certains
sabotages. »
Ce
furent d’abord le père Boclé
et son fils Henri qui composèrent et imprimèrent le journal.
Ils étaient obligés de le tirer quand les autres employés étaient absents,
le dimanche ou le soir ce qui
prenait beaucoup de temps pour sortir un journal. Le premier numéro sortit
ainsi grâce à ces deux personnes. Le second fils Boclé, réfractaire au
S.T.O
ne peut apporter son aide car il se cache dans la campagne .
Boclé demande à François
( Jean Devienne
) l’autorisation de
mettre dans le coup les autres employés , il hésite mais finalement Melle
Crozon et M. Crassin coururent les mêmes risques que les autres. Seul un
jeune apprenti fut tenu à l’écart de cette aventure. Par la suite le
second fils Boclé, qui envisageait de se rendre dans un maquis et pourquoi
pas dans un maquis du F.N
, fut aussi affecté à
l’impression du journal. François ( Jean Devienne) considéra qu’il
serait plus utile à la Résistance à la fabrication du journal. En effet,
indiqua Jean Devienne, « le journal est une des plus sûres ressources pour
l’alimentation financière de nos maquis des Côtes du Nord. Nos hommes le
vendent dans les villages à 15, 20 ou 30 francs l’exemplaire selon la générosité
des clients.
Chaque numéro nous rapporte plus de cent mille francs par mois. Il ne
faut pas que notre organe d’expression
reste en panne, faute de main d’œuvre ! » C’est ainsi que
Loulou, se cachait la journée et imprimait le journal la nuit Rue
Gambetta. Quand il
manquait du papier, des amis des Côtes du Nord apportaient des stocks qu’ils s’étaient procurés au
dehors. C’est dans ces conditions que neuf numéros du Patriote furent
imprimés, le dixième ne put sortir faute de courant électrique !
En
principe nous composions le dimanche et imprimions le lundi, précise Louis
Boclé
. Une fois des officiers
allemands vinrent visiter l’atelier alors que le tirage du journal était en
cours ; grâce à la présence d’esprit de Crassin ils ne virent rien
de ce qui se passait à ce moment- là. Une fois imprimé, il fallait faire
sortir les paquets de journaux de l’atelier. François
( Jean Devienne
) et Christiane
emportaient les ballots de journaux par la gare de Morlaix.
Sur ceux-ci des étiquettes anodines étaient collées ( Librairie Untel, Ecole X, etc ) afin de faire croire à des
livraisons de livres scolaires. Un chef de train complice remettait ensuite
les ballots à un autre employé à la gare de Saint-Brieuc. Quelques fois
François ( Jean Devienne) n’allait pas jusqu'à la gare, c’étaient des
chauffeurs d’autos affectés aux transports des journaux régionaux qui
emportaient les colis dans leur tournée normale. Souvent François ( Jean
Devienne) arrivaient à Morlaix en pleine nuit accompagné de Christiane
et de Claudine, quelque fois ils
amenaient des inconnus. La famille Boclé
s’arrangeait pour les faire dîner et coucher, rue des
Vigneries. Parfois on nous demandait de manier les valises avec précaution
car le journalisme était une des actions les moins périlleuses du groupe, se
rappelle Louis Boclé...
Louis
Boclé
et ses fils , composant
le journal la nuit dans le silence de l’atelier
éprouvaient l’ étrange sensation d’être surveillés. « Si ce n’est qu’une balle dans la tête, disait Henri à son
père, ce sera vite fini ; mais s’ils nous torturent, ce sera moins drôle ! ».
Les Allemands cherchaient des imprimeries clandestines alors que le journal était
imprimé chez un imprimeur, dans le département voisin, ce qui a probablement
permis au Patriote des Côtes du Nord de sortir régulièrement pendant un an
à la barbe des occupants ! ( [1])